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Le feuilleton tonkinois
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21 janvier 2009

Têt

 

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Cette semaine précède le jour de l’an du calendrier lunaire alors les rues de Hanoi sont prises de fièvre. Il y a trois millions et demi d’habitants et chaque foyer veut être prêt pour les fêtes. La route-digue de Nghi Tâm est un fleuve qui charrie des pêchers en fleur et des clémentiniers chargés de fruit. D’aussi loin que porte la vue les branches roses des pêchers s’élancent par-dessus la marée des casques. Les clémentiniers taillés en sapins de Noël oscillent dangereusement dans le flux sans fin. On les transporte en vélo, en moto, en camion. Parfois, ils sont tellement hauts qu’un acolyte suit avec un balai  pour soulever les fils électriques pendants qui empêchent le passage. Alors derrière, tous les véhicules se stockent dans un grand concert de klaxons insistants mais placides. La rue s’engorge. Les motos tentent une échappée mais il y a aussi les piétons et les palanches, alors centimètre par centimètre chacun pousse sa roue avec obstination jusqu’à ce que d’un coup le barrage cède et le flot s’écoule. Le bouchon se résorbe et s’éloigne en cornant à qui mieux mieux.

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Le Vietnam est photogénique. Je me fraye un passage dans les rues, les yeux qui piquent et la gorge qui gratte. Les oreilles qui sonnent, le cœur qui bat à chaque nouvelle charge de véhicules hasardeux. Tous les sens sont sollicités, épuisés par l’overdose de sensations brutales. Trop de gens, trop actifs dans trop peu de place. Le ciel est gris et bas souvent, barré d’écheveaux de fils, les façades anciennes sont lépreuses et disparaissent derrière les rajouts disgracieux. Terrasses de béton, avancées de tôle, panneaux publicitaires criards, signes d’intense activité économique et de petits moyens.

Et pourtant la moindre photo produit des résultats inattendus. Ce que l’œil saturé ne perçoit pas est fixé par magie. La grâce des sourires, la gaieté des couleurs, la caresse de la lumière sur les chapeaux coniques tout à coup se révèlent. Hanoi intemporel existe sur pellicule tel qu’il nous est encore vendu. Hanoi muet et silencieux. Comme le fantôme d’un passé qui s’estompe à toute vitesse.

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