Voyage dans le Nord du Viet Nam

Départ en début d’après-midi. Harnachés comme des bêtes de somme. Les deux engins hauts sur pattes à la selle étroite et dure, flanqués de sacoches militaires. Pour y grimper il faut se hisser sur le cale-pied ridiculement minuscule, donner un coup de rein, lever la jambe par-dessus le top-case arrimé sur le porte-bagage et se laisser glisser dans le dos du conducteur. Les genoux relevés haut, pas de prise et en glissade constante sur le carré de mousse plastifié placé sous les fesses sensé protéger des secousses.

Humeur nez au vent sur la digue presque déserte juste après le repas, les poumons pleins d’anticipation, quitter Hanoi par soi-même, un prodige, un luxe si rare.

Une heure plus tard, humeur en berne, premières crampes, poussière et gravats, graviers et camions, immondices et conducteurs fous, dans un rayon de deux heures autour de la capitale, le chaos est ignoble, le paysage laid à déprimer et la route dangereuse. Cercles infernaux à traverser le dos rond, en apnée ou presque, yeux rives sur la ligne bleue du massif de Tam Dao, où peut-être le soulagement nous attend.

Peu de pauses et le corps qui proteste contre l’inconfort de la position et les secousses de la conduite sans cesse brisée dans son élan par les nids de poule, les flaques sales et et les bosses, les véhicules dans tous les sens cornant du klaxon à qui effrayera le plus l’adversaire…

Traversée éprouvante, et si c'était comme ça partout ?

Les motos ahanent et broutent, rugissent et s’élancent et finissent par s’extraire de cette ceinture de laideur.