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Le feuilleton tonkinois
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27 septembre 2008

Sortir !

Temple_de_la_litterature_002

Mon rêve se précise, sortir de Hanoi, de la ville, de sa densité. Me retrouver à la campagne, sentir la terre, fouler des végétaux, avoir de l'espace...

C'est décidé, je m'inscris pouraller  visiter une petite distillerie de liqueur de fruit et d’huiles essentielles à vingt kilomètres d'ici.

Il pleuvait à moitié sur Hanoi. Horizon bas, chaussée grasse, les immeubles disgracieux de la périphérie et les forêts de pylônes s’estompent dans une grisaille mi-pollution, mi-brume. Le minibus cahote à trente à l’heure sous d’improbables sections de ponts autoroutiers qui ne mènent nulle part. De gigantesques piles de béton qui coupent le tissu dense des habitations à hauteur du deuxième étage et s’arrêtent brutalement dans un enchevêtrement de ferraille et de gravats. Comme si le dragon de béton avait été foudroyé dans son élan. Les chantiers sont arrêtés. C'est la crise. Plus d’argent ? Dessous la route est défoncée, les nids de poule noyés par la pluie molle. Motos, bus et camions se frôlent, se gênent, se klaxonnent, amortisseurs gémissants et craquant dans les trous et les bosses. Nous roulons sur une digue surplombant des marigots ou peut-être un bras du fleuve. Des buffles aux cornes aplaties sur le dos infusent dans l’eau immobile. Des troupeaux de canards blancs sont posés sur l’herbe drue des pentes, des plastiques, des ordures jonchent les bas-côtés. Il y a une impression d’inachevé et de négligé.

Sur la droite toujours ces étranges maisons à trois ou quatre étages qui ressemblent à des tranches d’immeubles. Seules les étroites façades portent des fenêtres, des balcons et de la peinture. Les longs flancs restent aveugles et bruts. Des coulures disgracieuses de noires moisissures s’accrochent au ciment. Pourquoi n’y-a-t-il aucune ouverture sur les côtés ? Est-ce interdit ? Il y a une incroyable variété dans l’architecture, signe d’une absence de plan d’urbanisme. Certaines habitations portent clochetons étoilés ou pagodes alambiquées, d’autres penchent pour un style plus européen avec imitations de toits haussmanniens en zinc à pan coupés, ou pavillons ornés d’œils de bœuf sertis dans des pâtisseries de stuc. Il y en a des bleu-vifs, et des verts-jardin, même si la norme est plutôt dans le jaune paille. Il y en a d’esthétiques ornées de larges vasques de bougainvillées à tous les étages et d’antipathiques enfermées dans une cage grillagée pour éviter les intrusions.

C'est ça la campagne? On cahote encore et toujours dans une zone indéfinissable. Construite çà et là, crevée d'excavations, soulevée de remblais, ponctuée de petits champs mals entretenus. Un terrain vague sans début ni fin, un no man's land imprécis qui serre le coeur.

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